Roxanne du Lac ( Laetitia Marie)

vendredi 21 février 2014

Démocratie et littérature.




CHAPITRE XIII.
Physionomie littéraire des siècles démocratiques (extrait)



Dans les démocraties, il s’en faut de beaucoup que tous les hommes qui s’occupent de littérature aient reçu une éducation littéraire, et, parmi ceux d’entre eux qui ont quelque teinture de belles-lettres, la plupart suivent une carrière politique, ou embrassent une profession dont ils ne peuvent se détourner que par moments, pour goûter à la dérobée les plaisirs de l’esprit. Ils ne font donc point de ces plaisirs le charme principal de leur existence ; mais ils les considèrent comme un délassement passager et nécessaire au milieu des sérieux travaux de la vie : de tels hommes ne sauraient jamais acquérir la connaissance assez approfondie de l’art littéraire pour en sentir les délicatesses ; les petites nuances leur échappent. N’ayant qu’un temps fort court à donner aux lettres, ils veulent le mettre à profit tout entier. Ils aiment les livres qu’on se procure sans peine, qui se lisent vite, qui n’exigent point de recherches savantes pour être compris. Ils demandent des beautés faciles qui se livrent d’elles-mêmes et dont on puisse jouir sur l’heure ; il leur faut surtout de l’inattendu et du nouveau. Habitués à une existence pratique, contestée, monotone, ils ont besoin d’émotions vives et rapides, de clartés soudaines, de vérités ou d’erreurs brillantes qui les tirent à l’instant d’eux-mêmes et les introduisent tout à coup, et comme par violence, au milieu du sujet.
Qu’ai-je besoin d’en dire davantage ? et qui ne comprend, sans que je l’exprime, ce qui va suivre ?
Prise dans son ensemble, la littérature des siècles démocratiques ne saurait présenter, ainsi que dans les temps d’aristocratie, l’image de l’ordre, de la régularité, de la science et de l’art ; la forme s’y trouvera, d’ordinaire, négligée et parfois méprisée. Le style s’y montrera souvent bizarre, incorrect, surchargé et mou, et presque toujours hardi et véhément. Les auteurs y viseront à la rapidité de l’exécution plus qu’à la perfection des détails. Les petits écrits y seront plus fréquents que les gros livres, l’esprit que l’érudition, l’imagination que la profondeur ; il y régnera une force inculte et presque sauvage dans la pensée, et souvent une variété très grande et une fécondité singulière dans ses produits. On tâchera d’étonner plutôt que de plaire, et l’on s’efforcera d’entraîner les passions plus que de charmer le goût.
Il se rencontrera sans doute de loin en loin des écrivains qui voudront marcher dans une autre voie, et, s’ils ont un mérite supérieur, ils réussiront, en dépit de leurs défauts et de leurs qualités, à se faire lire ; mais ces exceptions seront rares, et ceux mêmes qui, dans l’ensemble de leurs ouvrages, seront ainsi sortis du commun usage, y rentreront toujours par quelques détails.

De la démocratie en Amérique. Alexis de Tocqueville


jeudi 13 février 2014

Les oubliés.

Quiétude de la nuit, la pièce respire, l'ampoule s'affaiblit, puis s'éteint sans éclats...
Je poursuis mon travail dans le noir à la lueur de mon écran d'ordinateur. Quelques minutes passent.
L'ampoule se réanime tel un feu qu'on attise avec délicatesse. La lumière envahit à nouveau la pièce. 
La clenche de la porte s'incline vers le bas puis se relève en silence. Personne devant, personne derrière.
Je souris, ça tombe bien, je souhaitais faire une pause...
Installez-vous, prenons un café et discutons...
Il me reste peu d'heures de sommeil, la rue s'anime dès l'aube. Les fous se réveillent, il est temps pour moi de me reposer. Plus la lumière du jour se glisse entre les ruelles du village et plus la circulation s'affole.
Je me couche au petit matin, je me lève au petit matin, je suis au rendez-vous du petit matin.
Quelques minutes de retard, on me refuse.
Je me révolte.
Vous, qui la fois précédente, osiez me convoquer à un rendez-vous en sachant que vos portes seraient fermées. Vous, qui pensiez qu'Amazon ou l'espace culturel de Leclerc étaient des librairies. Vous, qui osiez me dire que la littérature n'existe plus. "Oh, Ma Dame, je vous mets dans quelle catégorie ? Les Lettres n'existent pas dans mon fichier informatique."
"Les Lettres s'effacent, les chiffres prennent le pouvoir...A quoi ça sert de mettre les chiffres en avant quand on ne sait pas compter...Moins d'offres que de demandes, travailler plus pour gagner moins, tout cela pour dépenser plus que l'on a. Créez la case: rêveur en perte de créativité ou bien en voie de disparition"

Aujourd'hui, vous me refusez pour une aiguille au poing levé un peu trop haut. Veuillez m'excuser, je ne porte pas de montre. Le temps est un leurre qui conduit l'Homme à l'anéantissement. Je hais cette dépendance qui me lie à vous.
Vivement le retour de la nuit, les fantômes sont des êtres bien plus intéressants, ils m'ouvrent les portes et m'éclairent vers un autre monde: celui des oubliés.



Roxanne Du Lac (LML) 2014

mercredi 12 février 2014

Le Vaisseau Spécial


Le Vaisseau Spécial
(Laëtitia Marie)



Travail d'écriture "radiophonique" 
( musique imposée, texte libre, travail sur la voix, 
introduire des bruitages, enregistrement sur un simple smartphone)


mardi 11 février 2014




Je ne voulais pas naître. Mes parents ont attendu sept années avant de me voir apparaître.
Je ne voulais pas naître. J'ai tardé, dépassé la date avant d'être.
Je ne voulais pas naître. Je connaissais déjà mon caractère salpêtre.
Je hais ce monde. Je ne suis pas de ce monde et je ne le serai jamais.

Roxanne Du Lac
(LML)

lundi 3 février 2014

Va me chercher des bananes!

Extrait: 

Vile putain qu'elle est, prête à déféquer sur ce monde tout aussi ignoble qu'elle. Elle veut jouer dans la cour des grands, mais elle n'est qu'une petite poupée au corps désarticulé. Rien dans la tête. Petit grain de folie. Hauts les cœurs, huez si cela vous plaît la sorcière qui est en elle. Haut-le-cœur, elle vous gerbe son bouquet fleuri de douleurs sur vos faibles esprits étriqués. Elle emmerde le conformisme, les obligations et les restrictions. En somme, elle emmerde la vie depuis sa naissance. Rien de plus égoïste que de donner la vie. Son premier cri déversait sa haine contre cette sélection naturelle incontrôlable. Pourquoi elle ? Qui avait décidé pour elle ? Elle ne voulait pas vivre parce qu'elle préfère la nuit, les fantômes, l'invisible, le silence, le néant. La vie est une torture perpétuelle. La beauté des paysages, les sentiments d'amour, les joies ne sont que des leurres pour lui faire accepter une condition humaine qui salit son âme et son innocence. Dis, quand arrivera l'heure du soulagement ? Quand la mort viendra-t-elle balayer tous ses péchés d'avoir vécu dans un monde qu'elle n'a jamais désiré. 

(Laetitia Marie-Legros)1993-2013

Cher Père Noël,

Je souhaiterais un punching ball avec mon portrait. J'ai besoin de me défouler sur ma plus grande ennemie.

Roxanne Du Lac (LML)2013

La valise vide





Aujourd'hui, je ne pars pas sur Paris les mains vides, mais avec une valise vide.

Un petit voyage imaginaire.


A mon retour, elle sera peut-être chargée d'histoires à raconter...


Roxanne Du Lac (LML) 2013

« Tout le bonheur des hommes est dans l'imagination. » 
Marquis de Sade

« Avant de savoir où tu vas, apprends à savoir d'où tu viens. » 
Guillaume le Conquérant


N'importe où hors du Monde




N'IMPORTE OÙ HORS DU MONDE


Cette vie est un hôpital où chaque malade est possédé du désir de changer de lit. Celui-ci voudrait souffrir en face du poêle, et celui-là croit qu'il guérirait à côté de la fenêtre. 
Il me semble que je serais toujours bien là où je ne suis pas, et cette question de déménagement en est une que je discute sans cesse avec mon âme. 
"Dis-moi, mon âme, pauvre âme refroidie, que penserais-tu d'habiter Lisbonne? Il doit y faire chaud, et tu t'y ragaillardirais comme un lézard. Cette ville est au bord de l'eau; on dit qu'elle est bâtie en marbre, et que le peuple y a une telle haine du végétal, qu'il arrache tous les arbres. Voilà un paysage selon ton goût; un paysage fait avec la lumière et le minéral, et le liquide pour les réfléchir!" 
Mon âme ne répond pas. 
"Puisque tu aimes tant le repos, avec le spectacle du mouvement, veux-tu venir habiter la Hollande, cette terre béatifiante? Peut-être te divertiras-tu dans cette contrée dont tu as souvent admiré l'image dans les musées. Que penserais-tu de Rotterdam, toi qui aimes les forêts de mâts, et les navires amarrés au pied des maisons?" 
Mon âme reste muette. 
"Batavia te sourirait peut-être davantage? Nous y trouverions d'ailleurs l'esprit de l'Europe marié à la beauté tropicale." 
Pas un mot. - Mon âme serait-elle morte? 
"En es-tu donc venue à ce point d'engourdissement que tu ne te plaises que dans ton mal? S'il en est ainsi, fuyons vers les pays qui sont les analogies de la Mort. 
- Je tiens notre affaire, pauvre âme! Nous ferons nos malles pour Tornéo. Allons plus loin encore, à l'extrême bout de la Baltique; encore plus loin de la vie, si c'est possible; installons-nous au pôle. Là le soleil ne frise qu'obliquement la terre, et les lentes alternatives de la lumière et de la nuit suppriment la variété et augmentent la monotonie, cette moitié du néant. Là, nous pourrons prendre de longs bains de ténèbres, cependant que, pour nous divertir, les aurores boréales nous enverront de temps en temps leurs gerbes roses, comme des reflets d'un feu d'artifice de l'Enfer!" 
Enfin, mon âme fait explosion, et sagement elle me crie: "N'importe où! n'importe où! pourvu que ce soit hors de ce monde!"

Baudelaire

Le papillon




Le papillon

Naître avec le printemps, mourir avec les roses,
Sur l'aile du zéphyr nager dans un ciel pur,
Balancé sur le sein des fleurs à peine écloses,
S'enivrer de parfums, de lumière et d'azur,
Secouant, jeune encor, la poudre de ses ailes,
S'envoler comme un souffle aux voûtes éternelles,
Voilà du papillon le destin enchanté!
Il ressemble au désir, qui jamais ne se pose,
Et sans se satisfaire, effleurant toute chose,
Retourne enfin au ciel chercher la volupté!

Alphonse de LAMARTINE

« Je n'ai jamais eu la chance de manquer un train auquel il soit arrivé un accident. »
 Jules Renard

dimanche 2 février 2014

Extrait d' Une idée sur les romans" -Sade

Extrait d' Une idée sur les romans" -Sade  —  Les Crimes de l'amour, Nouvelles héroïques et tragiques.
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A quoi servent les romans ?

A quoi ils servent, hommes hypocrites et pervers, car vous seuls faites cette ridicule question, ils servent à vous peindre, et à vous peindre tels que vous êtes, orgueilleux individus qui voulez vous soustraire au pinceau, parce que vous en redoutez les effets : le roman étant, s'il est possible de s'exprimer ainsi, le tableau des mœurs séculaires, est aussi essentiel que l'histoire, au philosophe qui veut connaître l'homme; car le burin de l'une, ne le peint que lorsqu'il se fait voir; et alors ce n'est plus lui; l'ambition, l'orgueil couvrent son front d'un masque qui ne nous représente que ces deux passions, et non l'homme; le pinceau du roman, au contraire, le saisit dans son intérieur... le prend quand il quitte ce masque,et l'esquisse bien plus intéressante, est en même temps bien plus vraie : voilà l'utilité des romans; froids censeurs qui ne les aimez pas, vous ressemblez à ce cul-de-jatte qui disait aussi : et pourquoi fait-on des portraits ?
S'il est donc vrai que le roman soit utile, ne craignons point de tracer ici quelques-uns des principes que nous croyons nécessaires à porter ce genre à sa perfection; je sens bien qu'il est difficile de remplir cette tâche sans donner des armes contre moi; ne deviens-je pas doublement coupable de n'avoir pasbien fait, si je prouve que je sais ce qu'il faut pour faire bien. Ah! laissons ces vaines considérations, qu'elles s'immolent à l'amour de l'art.
La connaissance la plus essentielle qu'il exige est bien certainement celle du cœur de l'homme. Or, cette connaissance importante, tous les bons esprits nous approuveront sans doute en affirmant qu'on ne l'acquiert que par desmalheurs et par des voyages; il faut avoir vu des hommes de toutes les nations pour les bien connaître, et il faut avoir été leur victime pour savoir les apprécier; la main de l'infortune, en exaltant le caractère de celui qu'elle écrase, le met à la juste distance où il faut qu'il soit pour étudier les hommes; il les voit de là, comme le passager aperçoit les flots en fureur se briser contre l'écueil sur lequel l'a jeté la tempête; mais dans quelque situation que l'ait placé la nature ou le sort, s'il veut connaître les hommes, qu'il parle peu quand il est avec eux; on n'apprend rien quand on parle, on ne s'instruit qu'en écoutant; et voilà pourquoi les bavards ne sont communément que des sots.
O toi qui veux parcourir cette épineuse carrière ! ne perds pas de vue que le romancier est l'homme de la nature, elle l'a créé pour être son peintre; s'il ne devient pas l'amant de sa mère dès que celle-ci l'a mis au monde, qu'il n'écrive jamais, nous ne le lirons point; mais s'il éprouve cette soif ardente de tout peindre, s'il entr'ouvre avec frémissement le sein de la nature, pour y chercher son art et pour y puiser des modèles, s'il a la fièvre du talent et l'enthousiasme du génie, qu'il suive la main qui le conduit, il a deviné l'homme, il le peindra; maîtrisé par son imagination qu'il y cède, qu'if embellisse ce qu'il voit : le sot cueille une rose et l'effeuille, l'homme de génie la respire et la peint: voilà celui que nous lirons.
Mais en te conseillant d'embellir, je te défends de t'écarter de la vraisemblance: le lecteur a droit de se fâcher quand il s'aperçoit que l'on veut trop exiger de lui; il voit bien qu'on cherche à le rendre dupe; son amour-propre en souffre, il ne croit plus rien dès qu'il soupçonne qu'on veut le tromper.
Contenu d'ailleurs par aucune digue, use, à ton aise, du droit de porter atteinte à toutes les anecdotes de l'histoire, quand la rupture de ce frein devient nécessaire aux plaisirs que tu nous prépares; encore une fois, on ne te demande point d'être vrai, mais seulement d'être vraisemblable; trop exiger de toi serait nuire aux jouissances que nous en attendons: ne remplace point cependant le vrai par l'impossible, et que ce que tu inventes soit bien dit; on ne te pardonne de mettre ton imagination à la place de la vérité que sous la clause expresse d'orner et d'éblouir. On n'a jamais le droit de mal dire, quand on peut dire tout ce qu'on veut; si tu n'écris comme R*** que ce que tout le monde sait, dusses-tu, comme lui, nous donner quatre volumes par mois, ce n'est pas la peine de prendre la plume: personne ne te contraint au métier que tu fais; mais si tu l'entreprends, fais-le bien. Ne l'adopte pas surtout comme un secours à ton existence; ton travail se ressentirait de tes besoins, tu lui transmettrais ta faiblesse; il aurait la pâleur de la faim: d'autres métiers se présentent à toi; fais des souliers, et n'écris point des livres. Nous ne t'en estimerons pas moins, et comme tu ne nous ennuiras pas, nous t'aimerons peut-être davantage.
Une fois ton esquisse jetée, travaille ardemment à l'étendre, mais sans te resserrer dans les bornes qu'elle paraît d'abord te prescrire; tu deviendrais maigre et froid avec cette méthode; ce sont des élans que nous voulons de toi, et non pas des règles; dépasse tes plans, varie-les, augmente-les; ce n'est qu'en travaillant que les idées viennent. Pourquoi ne veux-tu pas que celle qui te presse quand tu composes, soit aussi bonne que celle dictée par ton esquisse ? Je n'exige essentiellement de toi qu'une seule chose, c'est de soutenir l'intérêt jusqu'à la dernière page; tu manques le but, si tu coupes ton récit par des incidents, ou trop répétés, ou qui ne tiennent pas au sujet; que ceux que tu te permettras soient encore plus soignés que le fond: tu dois des dédommagements au lecteur quand tu le forces de quitter ce qui l'intéresse, pour entamer un incident. Il peut bien te permettre de l'interrompre, mais il ne te pardonnera pas de l'ennuyer; que tes épisodes naissent toujours du fond du sujet et qu'ils y rentrent; si tu fais voyager tes héros, connais bien le pays où tu les mènes, porte la magie au point de m'identifier avec eux; songe que je me promène à leurs côtés, dans toutes les régions où tu les places; et que peut-être plus instruit que toi, je ne te pardonnerai ni une invraisemblance de mœurs, ni un "défaut de costume, encore moins une faute de géographie: comme personne ne te contraient à ces échappées, il faut que tes descriptions locales soient réelles, ou il faut que tu restes au coin de ton feu; c'est le seul cas dans tous tes ouvrages où l'on ne puisse tolérer l'invention, à moins que les pays où tu me transportes ne soient imaginaires, et, dans cette hypothèse encore, j'exigerai toujours du vraisemblable.
Evite l'afféterie de la morale; ce n'est pas dans un roman qu'on la cherche; si les personnages que ton plan nécessite, sont quelquefois contraints à raisonner, que ce soit toujours sans affectation, sans la prétention de le faire, ce n'est jamais l'auteur qui doit moraliser, c'est le personnage, et encore ne le lui permet-on, que quand il y est forcé par les circonstances.
Une fois au dénouement, qu'il soit naturel, jamais contraint, jamais machiné, mais toujours né des circonstances; je n'exige pas de toi, comme les auteurs de l'Encyclopédie, qu'il soit conforme au désir du lecteur; quel plaisir lui reste-t-il quand il a tout deviné ? le dénouement doit être tel que les évènements le préparent, que la vraisemblance l'exige, que l'imagination l'inspire; et avec ces principes que je charge ton goût et ton esprit d'étendre, si tu ne fais pas bien, au moins feras-tu mieux que nous; car, il faut en convenir, dans les nouvelles que l'on va lire, le vol hardi que nous nous sommes permis de prendre, n'est pas toujours d'accord avec la sévérité des règles de l'art; mais nous espérons que l'extrême vérité des caractères en dédommagera peut-être; la nature plus bizarre que les moralistes ne nous la peignent, s'échappe à tout instant des digues que la politique de ceux-ci voudrait lui prescrire; uniforme dans ses plans, irrégulière dans ses effets, son sein toujours agité, ressemble au foyer d'un volcan d'où s'élancent tour à tour, ou des pierres précieuses servant au luxe des hommes, ou des globes de feu qui les anéantissent; grande, quand elle peuple la terre d'Antonin et de Titus; affreuse, quand elle y vomit des Andronics ou des Nérons; mais toujours sublime, toujours majestueuse, toujours digne de nos études, de nos pinceaux et de notre respectueuse admiration, parce que ces desseins nous sont inconnus, qu'esclaves de ses caprices ou de ses besoins, ce n'est jamais sur ce qu'ils nous font éprouver que nous devons régler nos sentiments pour elle, mais sur sa grandeur, sur son énergie, quels que puissent être les résultats.
A mesure que les esprits se corrompent, à mesure qu'une nation vieillit, en raison de ce que la nature est plus étudiée, mieux analysée, que les préjugés sont mieux détruits, il faut la faire connaître davantage. Cette loi est la même pour les arts; ce n'est qu'en avançant qu'ils se perfectionnent, ils n'arrivent au but que par des essais. Sans doute il ne fallait pas aller si loin dans ces temps affreux de l'ignorance, où courbés sous les fers religieux, on punissait de mort celui qui voulait les apprécier, où les bûchers de l'inquisition devenaient le prix des talents; mais dans notre état actuel, partons toujours de ce principe: quand l'homme a soupesé tous ses freins, lorsque d'un regard audacieux, son œil mesure ses barrières, quand, à l'exemple des Titans, il ose jusqu'au ciel porter sa main hardie, et qu'armé de ses passions, comme ceux-ci l'étaient des laves du Vésuve, il ne craint plus de déclarer la guerre à ceux qui le faisaient frémir autrefois, quand ses écarts mêmes ne lui paraissent plus que des erreurslégitimées par ses études, ne doit-on pas alors lui parier avec la même énergie qu'il emploie lui-même à se conduire ? l'homme du dix-huitième siècle, en un mot, est-il donc celui du onzième ?
Terminons par une assurance positive, que les nouvelles que nous donnons aujourd'hui, sont absolument neuves et nullement brodées sur des fonds connus. Cette qualité est peut-être de quelque mérite dans un temps où tout semble être fait, où l'imagination épuisée des auteurs paraît ne pouvoir plus rien créer de nouveau, et où l'on n'offre plus au public que des compilations, des extraits ou des traductions.
Cependant la Tour Enchantée, et la Conspiration d'Amboise, ont quelques fondements historiques; on voit, à la sincérité de nos aveux, combien nous sommes loin de vouloir tromper le lecteur; il faut être original dans ce genre, ou ne pas s'en mêler.
Voici ce que dans l'une et l'autre de ces nouvelles, on peut trouver aux sources que nous indiquons.
L'historien arabe Abttl-cœcim-terif-abentariq, écrivain assez peu connu de nos littérateurs du jour, rapporte ce qui suit, à l'occasion de la Tour Enchantée.
« Rodrigue, prince efféminé, attirait à la cour, par principe de volupté, les filles de ses vassaux, et il en abusait. De ce nombre fut Florinde, fille du comte Julien. Il la viola. Son père, qui était en Afrique, reçut cette nouvelle par une lettre allégorique de sa fille; il souleva les Mores, et revint en Espagne à leur tête; Rodrigue ne sait que faire, nul fonds dans ses trésors, aucune place : il va fouiller la Tour Enchantée, près de Tolède, où on lui dit qu'il doit trouver des sommes immenses; il y pénètre, et voit une statue du Temps qui frappe de sa massue, et qui, par une inscription, annonce à Rodrigue toutes les infortunes qui l'attendent; le prince avance et voit une grande cuve d'eau, mais point d'argent; il revient sur ses pas; il fait fermer la tour; un coup de tonnerre emporte cet édifice, il n'en reste plus que des vestiges. Le roi, malgré ces funestes pronostics, assemble une armée, se bat huit jours près de Cordoue, et est tué sans qu'on puisse retrouver son corps. »
Voilà ce que nous a fourni l'histoire; qu'on lise notre ouvrage maintenant, et qu'on voie si la multitude d'évènements que nous avons ajoutés à la sécheresse de ce fait, mérite ou non que nous regardions l'anecdote comme nous appartenant en proprec.
Quant à la Conspiration d'Amboise, qu'on la lise dans Garnier, et l'on verra le peu que nous a prêté l'histoire.
Aucun Guide ne nous a précédé dans les autres nouvelles; fond, narré, épisode, tout est à nous; peut-être n'est-ce pas ce qu'il y a de plus heureux; qu'importe, nous avons toujours cru, et nous ne cesserons d'être persuadé, qu'il vaut mieux inventer, fût-on même faible, que de copier ou de traduire; l'un a la prétention du génie, c'en est une au moins; quelle peut être celle du plagiaire ? Je ne connais pas de métier plus bas, je ne conçois pas d'aveux plus humiliant que ceux où de tels hommes sont contraints, en avouant eux-mêmes, qu'il faut bien qu'ils n'aient pas d'esprit, puisqu'ils sont obligés d'emprunter celui des autres.
A l'égard du traducteur, à Dieu ne plaise que nous enlevions son mérite; mais il ne fait valoir que nos rivaux; et ne fût-ce que pour l'honneur de la patrie, ne vaut-il pas mieux dire à ces fiers rivaux, et nous aussi savons créer.
Je dois enfin répondre au reproche que l'on me fit, quand parut Aline et Valcourt. Mes pinceaux, dit-on, sont trop forts, je prête au vice des traits trop odieux; en veut-on savoir la raison ? je ne veux pas faire aimer le vice; je n'ai pas, comme Crébillon et comme Dorat, le dangereux projet de faire adorer aux femmes les personnages qui les trompent; je veux, au contraire, qu'elles les détestent; c'est le seul moyen qui puisse les empêcher d'en être dupes; et, pour y réussir, j'ai rendu ceux de mes héros qui suivent la carrière du vice; tellement effroyables, qu'ils n'inspireront bien sûrement ni pitié ni amour; en cela, j'ose le dire, je deviens plus moral que ceux qui se croyent permis de les embellir; les pernicieux ouvrages de ces auteurs ressemblent à ces fruits de l'Amérique qui, sous le plus brillant coloris, portent la mort dans leur sein; cette trahison de la nature, dont il ne nous appartient pas de dévoiler le motif, n'est pas faite pour l'homme; jamais enfin, je le répète, jamais je ne peindrai le crime que sous les couleurs de l'enfer; je veux qu'on le voie à nu, qu'on le craigne, qu'on le déteste, et je ne connais point d'autre façon pour arriver là, que de le montrer avec toute l'horreur qui le caractérise. Malheur à ceux qui l'entourent de roses ! leurs vues ne sont pas aussi pures, et je ne les copierai jamais. Qu'on ne m'attribue donc plus, d'après ces systèmes, le roman de J*** ; jamais je n'ai fait de tels ouvrages, et je n'en ferai sûrement jamais; il n'y a que des imbéciles ou des méchants qui, malgré l'authenticité de mes dénégations, puissent me soupçonner ou m'accuser encore d'en être l'auteur, et le plus souverain mépris sera désormais la seule arme avec laquelle je combattrai leurs calomnies.


«…mais il y a au monde une chose sainte et sublime, c'est l'union de deux de ces êtres si imparfaits et si affreux.
On est souvent trompé en amour, souvent blessé et souvent malheureux;
mais on aime, et quand on est sur le bord de sa tombe, on se retourne pour regarder en arrière et on se dit :
j'ai souffert souvent, je me suis trompé quelquefois, mais j'ai aimé.
C'est moi qui ai vécu, et non pas un être factice créé par mon orgueil et mon ennui.»
Alfred de Musset
                
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« J'aurais aimé t'aimer
     Comme on aime le soleil  

  Te dire que le monde est beau
Que c'est beau d'aimer
J'aurais aimer t'écrire 
Le plus beau des poèmes
Et construire un empire 
Juste pour ton sourire
Devenir le soleil 
Pour sécher tes sanglots
Et faire battre le ciel 
Pour un futur plus beau
Mais c'est plus fort que moi
Tu vois je n'y peux rien
Ce monde n'est pas pour moi 
Ce monde n'est pas le mien »
                                      Saez

Au lecteur

armando-lectrice-makine

La sottise, l'erreur, le péché, la lésine,
Occupent nos esprits et travaillent nos corps,
Et nous alimentons nos aimables remords,
Comme les mendiants nourrissent leur vermine.

Nos péchés sont têtus, nos repentirs sont lâches ;
Nous nous faisons payer grassement nos aveux,
Et nous rentrons gaiement dans le chemin bourbeux,
Croyant par de vils pleurs laver toutes nos taches.

Sur l'oreiller du mal c'est Satan Trismégiste
Qui berce longuement notre esprit enchanté,
Et le riche métal de notre volonté
Est tout vaporisé par ce savant chimiste.

C'est le Diable qui tient les fils qui nous remuent !
Aux objets répugnants nous trouvons des appas ;
Chaque jour vers l'Enfer nous descendons d'un pas,
Sans horreur, à travers des ténèbres qui puent.

Ainsi qu'un débauché pauvre qui baise et mange
Le sein martyrisé d'une antique catin,
Nous volons au passage un plaisir clandestin
Que nous pressons bien fort comme une vieille orange.

Serré, fourmillant, comme un million d'helminthes,
Dans nos cerveaux ribote un peuple de Démons,
Et, quand nous respirons, la Mort dans nos poumons
Descend, fleuve invisible, avec de sourdes plaintes.

Si le viol, le poison, le poignard, l'incendie,
N'ont pas encor brodé de leurs plaisants dessins
Le canevas banal de nos piteux destins,
C'est que notre âme, hélas ! n'est pas assez hardie.

Mais parmi les chacals, les panthères, les lices,
Les singes, les scorpions, les vautours, les serpents,
Les monstres glapissants, hurlants, grognants, rampants,
Dans la ménagerie infâme de nos vices,

Il en est un plus laid, plus méchant, plus immonde !
Quoiqu'il ne pousse ni grands gestes ni grands cris,
Il ferait volontiers de la terre un débris
Et dans un bâillement avalerait le monde ;

C'est l'Ennui ! - l'oeil chargé d'un pleur involontaire,
Il rêve d'échafauds en fumant son houka.
Tu le connais, lecteur, ce monstre délicat,
- Hypocrite lecteur, - mon semblable, - mon frère !

Charles Baudelaire

L'écriture

Au cours d'un atelier d'écriture, j'ai vu ma plume se délier ...
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Pourquoi suis-je ici ?
Dans cette salle de cours à vous écouter ?
J'ai un projet tout simplement. Vous me montrez le chemin.Un projet dans lequel l'objectif est de découvrir mon style d'écriture. Je le travaille, l'améliore. Il n'y acertainement pas de hasard si je me trouve face à vous aujourd'hui.
Face à vous ? Le suis-je vraiment ?  
Nous sommes en mesure de nous reconnaître si nos chemins se croisent de nouveau. Votre visage ne me sera pasindifférent. Peut-on dire que nous nous connaissons pour autant ? Non, je ne le pense pas. Face à vous, je ne le suis pas dans cette salle de cours, je le suis à cet instant même où je vous dévoile mon écriture et l'univers qui la caractérise.
Comment définir l'écriture ?
Si ce n'est qu'elle devient au cours de notre vie un réel besoin. Elle prend aufur et à mesure de notre existenceune place considérable.
Impossible de fuir.
Difficile de comprendre pourquoi nous sommes tributaires de cet acte.
Pourquoi en sommes-nous arrivés là ? Je ne peux répondre pour vous. Il m'a fallu tant d'années pour comprendre moi-même. J'ai réalisé qu'elle était liée à moi.
Se lever chaque matin en se demandant quel est son avenir ; Jamais trouver de réponse. Avancer dans la vie, dans différents rôles sans jamais trouver sa propre identité. Mon identité c'est elle. C'est dans la pratique de l'écriture que je me sens moi-même, que j'ai la sensation de travailler et de donner un sens à ma vie.
Si je devais décrire ma relation à la pratique de l'écrit, je pense que cela ressemblerait à une déclaration que l'on pourrait faire à une personne à laquelle nous sommes attachés. C'est un plaisir de s'isoler pour lui consacrer du temps. Lorsque le moment de nos retrouvailles sonne, je ressens un bien-être. J'ai hâte de me rendre au rendez-vous et de lui livrer mes confidences, mes envies, mes rêves, lui décrire comment je vois le monde. L'écriture est une échappatoire . C'est une façon de concrétiser mes idées , mes pensées, mon imagination. C'est leur donner une forme, une consistance. J'ai beaucoup de mal à écrire directement sur le clavier de mon ordinateur. J'ai besoin de sentir le stylo plume ou le crayon à papier entre mes doigts, entendre le frottement de la plume ou de la pointe sur le papier. Sentir l'odeur du papier, le toucher avant de me livrer. C'est une relation intime où je lui dévoile ce qu'il y a de plus profond chez un être, ce qui est caché, enfoui depuis toujours. Notre naissance est la mise à nue d'une personne, nous nous révélons au monde mais ce qui est en nous, ce que nous ressentons ne naît jamais véritablement. Lorsque nous parlons à l'autre, nous nous retenons parfois, nous oublions avec le temps ce que nous lui avons dit exactement. L'écriture est la plus belle révélation de ce que nous sommes réellement.
Si l'écriture devenait un être avec qui je pourrais converser, je lui dirais qu'elle est mon rituel quotidien et qu'elle devrait se préparer à me tenir compagnie toute la nuit, assise sur le canapé jusqu’au lever du soleil. Elle me captive et me dévore chaque nuit un peu plus.
A qui puis-je en vouloir de subir une telle addiction ?
Je pourrais accuser le papier qui m'attire, à la couleur bleutée et à la fluidité d'une écriture à la plume. Mais c'est à moi-même que je devrais m'en prendre. A mes pensées, mon imagination qui ne cessent de me tourmenter depuis de nombreuses années maintenant. Ces cris du coeur qui n'ont pas trouvé d'autres refuges. Ils s'échouent sur le papier, par faiblesse peut-être, je lâche le poids de l'ancre, je lâche mon encre et ainsi mon esprit reprend le souffle de la liberté.
Ce sont des nuits blanches où je rêve, où je me souviens, où j'invente sans savoir où je vais parfois. Je rêve les yeux ouverts. Tous ces souvenirs qui se mêlent à des idées inconnues et qui remplissent mes pages blanches. Parfois dans la joie, parfois dans la mélancolie, toujours accompagnée de quelques notes de piano, je souris , je pleure, je vis, je meurs.
La créativité est une machine qui fonctionne intérieurement en continu. J'ai toujours un carnet et un stylo avec moi, partout où je vais, je prends des notes et je me nourris de ma vie, de la vie, de scènes quotidiennes dans la rue, un sourire, un regard, une silhouette, une affiche, un mot, une conversation...
Tout est source d'inspiration.
La vie est la sève qui nourrit et fait éclore les idées, l'idée est une fleur que l'on soigne pour faire d'elle la plus belle et la plus rayonnante de notre jardin. Puis, une fois sur le papier, elle devient un fruit mûr qui n'a plus besoin de nous et qui peut partir en paix ou bien se faire dévorer des yeux et être dégustée en laissant quelques saveurs amères ou bien encore un bon goût inoubliable.
A chaque instant, ma mémoire est la bobine. Mes yeux, la technique de projection. Mon état se confond entre le songe et l'éveil. Mise en place de la grande toile blanche sur laquelle mon cerveau visualise enfin le contenu de la pellicule. C'est comme au cinéma sauf que je n'en suis qu'au montage. Les scènes défilent de manière incessante. Dès le lever du jour l'idée mûrit et monopolise mes pensées. C'est seulement une fois posée dans le silence de la nuit que je me réveille pour transcrire sur le papier cette fiction. Elle occupe et empiète ma réalité qui n'est plus que quelques moments furtifs dans mes journées. Le travail d'écriture n'est rien d'autre qu'une illusion d'optique que l'on décortique pour la faire vivre d'émotions, de ressentis. Créer à partir de nos sens une histoire en ajoutant d'autres sens et faire de ces bribes réelles une fiction à part entière.
Roxanne Du Lac 
(Laetitia Marie-Legros) 2010
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Commentaires Ancien blog sur L'écriture


    C'est beau comme on se débat avec des mots pour se livrer sans jamais arriver à faire le tour de nos passions...
    Posté par Norethrudvendredi 22 avril 2011 
  • C'est juste trop beau. L'écriture est dans nos vie à travers nos passions, nos problèmes, nos jours heureux et c'est ça qui en fait une oeuvre particulière... La tienne est mure, sage, sensible... Presque arrivée à son apogée... Je suis sure qu'une fois au sommet ça va éclater de partout: un véritable feu d'artifice d'émotions et de ressentis!
    Posté par Gourmandise, samedi 30 avril 2011 

Les Condamnés

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Nous voila face à face
Pour la dernière fois
Entends-tu les sabots
C'est l'armée du roi
Non non ne pleure plus
Il ne mérite pas
Et leur monde est perdu
Puisqu'on est condamnés
Qu'ils ont choisi pour nous
Un jour viendra où mon amour 
On sera libres on sera beaux
Comme un étoile indestructible

Pourquoi pourquoi les innocents
Tombent sur l'échafaud
Sans messe ni tombeau 
Ecoute ils frappent à la porte
Mais nos âmes enlacées
Sont bien trop loin pour eux
Alors fermons nos yeux à tout jamais
Rejoignons ensemble la liberté

Puisqu'on est condamnés
Qu'ils ont choisi pour nous
Un jour viendra où mon amour
On sera libres on sera beaux
Comme une étoile indestructible

Puisqu'on est condamnés 
Qu'ils ont choisi pour nous
Un jour viendra où mon amour
On sera libres on sera beaux
Comme une étoile indestructible
Saez